« Après le secret bancaire et la fraude fiscale, c’est au tour du blanchiment d’argent sale de se retrouver sur le devant de la scène politique internationale » (Les Echos, 25/04/13).
Cependant les banques n’ont pas attendu les récents éclairages pour déployer des dispositifs de plus en plus précis et structurés de prévention du blanchiment au sens large. La troisième directive européenne a eu une portée organisationnelle significative avec notamment l’approche par les risques et l’intégration de la fraude fiscale. Cependant, suite aux recommandations du GAFI de février 2012 et, au niveau national, aux résultats des contrôles menés par l’ACP ou par l’AMF, les règlementations se renforcent. Si elles n’apportent pas de grandes novations en terme de concept de contrôle, elles apportent des précisions et renforcent l’exigence à la fois de formalisme et d’efficacité des dispositifs.
Nous pouvons citer ainsi au niveau européen (5 février 2013) :
- Une directive relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (succédera à la 3ème Directive).
- Un règlement sur les informations accompagnant les virements de fonds visant à garantir la traçabilité en bonne et due forme de ces virements.
En France, à noter :
Le Décret n° 2012-1125 du 3 octobre 2012 relatif aux obligations de vigilance et de déclaration pour la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de LAB/FT (modifie les articles R. 561-10, R. 561-12, R. 561-16 et R. 561-20 du code monétaire et financier) qui vient apporter des précisions sur :
- Les règles de vigilance complémentaires vis-à-vis de pays à dispositif LAB/FT faible.
- Les mesures de vigilance complémentaires qui peuvent être mises en œuvre pour les relations à distance.
- Les opérations de change manuel.
- La dérogation, sous certaines conditions, de mise en œuvre de mesures de vigilance en matière de monnaie électronique dans le cas de l’acquisition de biens ou de services.
- Les règles de vigilance tout au long de la relation d’affaire (revue de dossiers, approche par les risques, documentation notamment).
Ces précisions se trouvent conforter avec les points d’attention relevés par l’ACP lors de ses contrôles , à savoir notamment :
- Une connaissance client pas toujours correctement formalisée.
- Un suivi des relations d’affaire pas toujours formalisé et suivi selon une approche par les risques.
- Une exploitation inadaptée des alertes.
- Des mouvements et fonds pas toujours justifiés.
A noter également :
Le Décret n° 2013-183 du 28 février 2013 relatif aux obligations de vigilance en matière de services de paiement en ligne pour la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme qui amène la création au sein du Code monétaire et financier de l’art. R561-16-1 (V).
L’ACP a fait évoluer par ailleurs le fameux QLB par l’adoption de l’Instruction n 2012-I-04. Une partie significative est dorénavant consacrée au dispositif de vigilance pour les prestataires de services de paiement (PSP), notamment dans le cadre des virements de fonds (19 questions sur ce thème).
L’AMF a également émis, début 2013, deux recommandations :
Position – recommandation AMF n° 2013-05 :
- Lignes directrices relatives à la notion de bénéficiaire effectif en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
Position – recommandation AMF n° 2013-04 :
- Lignes directrices relatives à la tierce introduction en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Citons enfin aux Etats Unis, le vote le 18 mars 2010 de la loi FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act), « rouleau compresseur américain », qui impose aux institutions financières étrangères des obligations déclaratives sur les revenus versés aux contribuables américains, ce qui suppose d’apporter la preuve que les autres clients non déclarés ne sont pas américains (applicable pour toute nouvelle ouverture de compte à compter du 1er janvier 2014). Cette imposition du dispositif au reste du monde ne sera pas sans conséquence sur la lutte contre la fraude fiscale. D’ores et déjà certains de nos ministres appellent à un ‘Fatca européen’. Dans l’attente, les banques travaillent à l’adaptation de leurs systèmes et de leurs procédures (notamment KYC) au futur dispositif.
Le sujet de la prévention du blanchiment reste plus que jamais d’actualité. C’est l’affaire de tous, rappelant la banque à sa responsabilité sociale. Cette prévention est avant tout un comportement attendu, encadré certes par des dispositifs de plus en plus précis mais qui ne doivent bien évidemment rien enlever à l’appréciation des risques liés aux actions opérationnelles, celles de la banque et celles des tiers.
Afin de bien saisir les tenants et aboutissants de ces thématiques, notamment dans la banque, il est recommandé de suivre une formation fiscalité.
(1) Voir JORF n°0232 du 5 octobre 2012 page 15580.
(2) Bilan des contrôles dans le secteur de la banque, 11 janvier 2013, Ivy-Stevan GUIHO, Inspecteur de la Banque de France – site internet ACP.