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Crise sanitaire et application d’IFRS 9

La crise sanitaire actuelle a rendu nécessaire de préciser, de la part des autorités réglementaires ou de supervision les modalités d’application d’IFRS 9 sur le traitement du risque de crédit dans le contexte particulier aujourd’hui.

1. Les principes d’IFRS 9

IFRS 9 a défini des règles pour appréhender le risque de crédit. Sans rentrer dans le détail de cette norme, nous pouvons les résumer ainsi.

Les engagements donnés et les crédits accordés sont classés à l’origine en Bucket 1. Ils font alors l’objet d’une comptabilisation du risque de crédit égale à la « perte attendue » 12 mois.

En cas d’augmentation significative du risque de crédit, et si le risque est autre que faible, l’encours est alors classé en Bucket 2. Le risque de crédit comptabilisé est alors égal à la « perte attendue » à maturité.

Si le crédit est en défaut, il est identifié en Bucket 3. Le risque de crédit comptabilisé est égal à la « perte attendue » à maturité.

Ces « pertes attendues » sont déterminées en prenant en compte les données historiques, la situation présente, ainsi que les prévisions raisonnables macro-économiques (approche « forward-looking »).

2. La position de l’IASB sur l’application d’IFRS 9 dans le contexte de la crise sanitaire actuelle

Face à la crise sanitaire actuelle, deux problèmes se posent :

  1. Comment doit-on apprécier les règles de transfert du Bucket 1 au Bucket 2
  2. Comment doit-on prendre en compte l’approche « forward looking » ?

En effet, la crise actuelle risque de dégrader le résultat des banques et donc impacter le montant de ses capitaux propres et de ses fonds propres prudentiels.

L’IASB a publié une note le 27 mars pour fournir des précisions sur l’application d’IFRS 9 dans le contexte actuel. Cette note précise un certain nombre de points.

IFRS 9 ne définit pas des règles mécaniques pour transférer les actifs de B1 à B2. Par exemple, le report des échéances lié à la crise actuelle sur un certain nombre de concours n’est pas forcément un critère « d’augmentation significative du risque de crédit » et donc de reclassement systématique en B2.

De même, la prise en compte des éléments « forward looking » doit être définie par la banque. Elle doit essayer d’évaluer au mieux les effets du covid-19, mais aussi les mesures d’accompagnement des États (garanties, etc.) pour calculer la « perte attendue » à maturité.

L’IASB reconnait que ces évaluations ne sont pas aisées et volatiles. Cependant, les changements des conditions économiques devraient se refléter dans les scénarios macroéconomiques appliqués par les banques dans leurs pondérations. Si les effets de covid-19 ne peuvent pas être reflétés dans les modèles, des ajustements post-modèles devront alors être pris en considération.

En conclusion, le document de l’IASB a pour objet de favoriser l’application cohérente des dispositions d’IFRS 9. Il rappelle donc les dispositions d’IFRS 9, Instruments financiers, que doivent suivre les entreprises qui examinent les incidences de la pandémie sur leur comptabilité des pertes de crédit attendues. Le document n’a pas pour objet de modifier les dispositions de la norme, ni d’ajouter ou d’abroger des articles.  Il encourage les établissements de crédit à prendre en compte aussi les recommandations des organismes de supervision.

3. La position de l’AMF

L’AMF a publié un communiqué sur ce sujet.

« En France, les mesures à caractère général mises en œuvre permettant entre autres des suspensions ou reports de paiement ou l’octroi de crédits complémentaires ne constituent pas mécaniquement un indicateur d’augmentation significative du risque de crédit des actifs financiers concernés en tant que tel. Ainsi, un encours classé en Étape 1 avant la survenance de la pandémie, et concerné par ces mesures exceptionnelles, sera maintenu en Étape 1 dès lors que ces mesures répondent à une contrainte de liquidité temporaire et qu’aucun autre élément ou information n’indique par ailleurs qu’une augmentation significative du risque de crédit sur la durée de vie de l’encours est intervenue. Le même type d’analyse peut être conduit pour un encours classé en Etape 2. Dans ce contexte, les sociétés apprécieront notamment dans quelle mesure les circonstances spécifiques et les mesures de soutien mises en œuvre par les pouvoirs publics constituent une justification permettant bien de réfuter la présomption d’une augmentation significative du risque de crédit en cas de retards de paiement.

De plus, dans les données macro-économiques prospectives utilisées pour déterminer les estimations long terme des pertes de crédit attendues, les sociétés françaises prendront en compte les effets positifs des mesures de soutien mises en œuvre par les pouvoirs publics. Compte tenu des incertitudes actuelles liées au COVID-19, les sociétés pourront accorder une importance plus forte aux perspectives stables long terme dans leurs calculs des pertes attendues.

Enfin, les garanties de certains encours octroyées par les pouvoirs publics dans le contexte particulier du COVID-19 seront généralement considérées, en France, comme des rehaussements de crédit faisant partie intégrante des encours et seront prises en compte dans l’évaluation des pertes de crédit attendues.

Les sociétés françaises veilleront enfin à présenter dans leurs prochains états financiers les informations nécessaires pour comprendre les expositions et les impacts liés au COVID-19. »

4. En conclusion

L’IASB ne modifie pas les dispositions d’IFRS 9. Il en précise les modalités d’application dans le contexte actuel. De même, l’AMF expose sa vision d’application d’IFRS 9 et rappelle l’obligation de fournir toutes les informations nécessaires, ainsi certainement que les incertitudes, dans les états financiers.

Cette newsletter a comme objectif d’expliquer les positions en terme comptable des autorités réglementaires. La présentation des mesures prudentielles prises par le comité de Bâle et les autorités européennes EBA et BCE dans le contexte de la crise sanitaire actuelle sera faite dans une newsletter dédiée.

Pour bien définir les contours de ces règlementation après l’IASB, une formation IFRS est recommandée.

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