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EBA Benchmarking exercice 2022 : de nouvelles améliorations apportées a la comparabilité entre les modèles internes des banques à prévoir

1.   Les principes de l’exercice de Benchmarking des modèles internes

1.1.   Une initiative de l’EBA s’inscrivant dans le cadre de la CRD IV

La CRD IV impose aux autorités compétentes de procéder à une évaluation annuelle de la qualité des modèles internes utilisés par les banques pour le calcul des exigences de fonds propres.
L’EBA a mis en place des analyses comparatives, dites « EBA Internal Model benchmarking exercice » pour aider les autorités compétentes dans cette évaluation. L’EBA calcule et distribue des valeurs de référence par rapport auxquelles les paramètres de risque de chaque établissement peuvent être comparés. Ces valeurs de référence sont basées sur les données soumises par les établissements qui incluent les informations sur les portefeuilles, les modèles ainsi que les définitions d’analyses comparatives à utiliser dans le cadre des exercices annuels de benchmarking.

1.2.   Un exercice de benchmarking prudentiel de L’EBA avec trois objectifs majeurs

Le premier objectif porte sur l’évaluation prudentielle de la qualité des modèles internes.
Le second objectif est de fournir un outil puissant pour expliquer et surveiller la variabilité des RWA dans le temps et les implications qui en résultent pour les ratios prudentiels. Dans ce rôle, le benchmarking exercice a été à l’origine, entre autres, de l’élaboration des guidelines de L’EBA sur l’estimation de PD et de LGD et le traitement des actifs en défaut, publiées le 17 novembre 2017.
Le troisième objectif porte sur l’utilisation des résultats du benchmarking. En effet, ces derniers fournissent aux banques des informations précieuses sur leur évaluation des risques par rapport à d’autres banques de la place ayant des portefeuilles comparables.
L’atteinte de ces trois objectifs est dépendante de la disponibilité des informations sur le niveau de conservatisme, incorporé dans les estimations des paramètres de risque ou dans les RWA. En particulier, il sera possible d’analyser la part de variabilité qui en découle.

2.   Les évolutions prévues dans le cadre du risque de marché pour l’exercice 2022

2.1.   Inclusion des données basées sur les sensibilités nécessaires à la FRTB

2.1.1.    Un besoin de préparer le cadre de reporting sur la FRTB conformément à la CRR2

L’EBA inclut la collecte de données de sensibilités. Cette étape est considérée comme une étape naturelle vers la mise en œuvre complète de la FRTB dans l’UE.
Ainsi des templates supplémentaires demandant des informations relatives à la méthode basée sur les sensibilités (SBM) de l’approche standard alternative (ASA) FRTB sont introduits. Bien que le cadre de risque de marché actuellement applicable et les exigences de reporting existantes qui y sont liées resteront inchangés dans un proche avenir, la CRR2 a introduit une obligation de reporting sur la FRTB. La FRTB n’est cependant pas encore contraignante en termes d’exigences de fonds propres. La première date de reporting réglementaire sur la FRTB a été fixée au 30 Septembre 2021 par la commission Européenne.

2.1.2.    Des évolutions graduelles du cadre de benchmarking sur le risque de marché en cohérence avec l’entrée en vigueur progressive des exigences FRTB

L’ITS de l’EBA sur les exigences de reporting sur le risque de marché s’appliquera à partir du 1er septembre 2021. Dans cet ITS, l’EBA a adopté une approche progressive étant donnée la nécessité d’adopter une approche proportionnée des exigences de reporting FRTB. En effet, les établissements continueront également d’être soumis au cadre de gestion des risques de marché actuel (non FRTB) et les exigences de reporting associées. Il ne faudrait donc pas alourdir de manière trop considérable les exigences réglementaires associées au risque de marché.
Suivant cette approche graduelle, cet exercice de benchmarking comprend une extension des templates de risque de marché in ligne avec l’approche standard alternative (ASA) FRTB. Sensible au risque, cette approche est conçue et calibrée pour servir de solution de repli crédible à l’approche du modèle interne au cas où les résultats des tests d’utilisation du modèle internes étaient insatisfaisants.
En cohérence avec une approche graduée, les deux autres éléments de l’ASA que sont le DRC et le RRAO seront inclus dans les exercices de benchmarking ultérieurs.

2.1.3.    Des nouveaux templates de benchmarking pour challenger les niveaux de fonds propres issus de l’ASA, solution de repli en cas de modèles internes insatisfaisants

Les templates proposés pour la collecte de données de sensibilité pour l’approche basée sur les sensibilités sont alignés sur la définition réglementaire des facteurs de risque pertinents de l’ASA et ne demanderont que les informations requises dans le cadre du calcul de l’ASA de manière claire et concise. Les informations demandées dans ces templates aideront les autorités compétentes à enquêter sur les sources de variabilité potentielle des exigences de fonds propres issues de l’ASA. L’ASA est la solution de repli à l’approche du modèle interne. Ceci pourrait se faire par exemple en réconciliant les facteurs de risque déclarés ou encore en réconciliant les sensibilités calculées.

2.1.4.    Une collecte des données de sensibilités ciblée à deux moments précis dans le temps

Il est proposé de collecter des données relatives au SBM à deux moments :

  • Le premier moment de collecte concerne la date de référence IMV (Initial Market Value) et comprend le reporting des informations de sensibilité relatives aux facteurs de risque spécifiés dans la SBM au niveau de l’instrument. La collecte faisant référence à la date de référence IMV doit permettre aux autorités compétentes d’effectuer une analyse précoce de la qualité des données de sensibilité et de soutenir l’évaluation des soumissions IMV faits par les établissements.
  • Le deuxième moment de collecte fait référence au dernier jour de la période de mesure du risque. Cette période est en général de deux semaines dans le cadre de l’exercice de benchmarking. Il est proposé de collecter à la fois les données de sensibilité au niveau des combinaisons entre les instruments et les portefeuilles et les données d’exigences de fonds propres au niveau du portefeuille.

2.2.   DES MISES À JOUR MINEURES apportées À LA LISTE DES INSTRUMENTS financiers

La structure globale des portefeuilles, telle qu’exigée lors des exercices précédents n’est pas modifiée. Quelques modifications mineures sont toutefois à noter :

  • Un certain nombre d’instruments, qui après trois exercices (2019-2021), étaient arrivés à maturité. Par conséquent, l’ITS 2022 remplace un certain nombre d’instruments par des instruments comparables avec des maturités plus longues.
  • La gamme d’instruments et de portefeuilles a été légèrement élargie, afin d’inclure les obligations souveraines datées et les instruments CDS.
  • La structure du portefeuille a été simplifiée en fixant à 1, le nombre d’instruments dans un portefeuille donné et en modifiant les définitions des instruments pour inclure les informations sur la quantité.

2.3.   Un besoin d’harmoniser le cadre de comptabilisation des instruments financiers afin d’améliorer la justification de la variabilité des RWA

Afin de simplifier l’utilisation des différentes terminologies utilisées pour le traitement des instruments, l’utilisation d’un langage standard, indistinctement du format réel choisi, peut être appliquée aux instruments de l’exercice de benchmarking. Ceci permettra de :

  • Mieux définir les instruments de manière très granulaire.
  • Réduire l’ambiguïté autour de la spécification des instruments.

La réduction de l’ambiguïté autour de la comptabilisation des instruments conduira mécaniquement à une réduction de la variabilité en sortie de modèles. En effet, cette variabilité dépendra désormais principalement des différences réelles du modèle, et non plus de l’interprétation sur les modalités de comptabilisation des différents instruments.

3.   Les évolutions prévues dans le cadre du risque de crédit pour l’exercice 2022

3.1.   Modifications proposées à des fins de transparence sur le niveau de prudence inclus dans les estimations des paramètres de risque

3.1.1.    les objectifs de l’exercice de benchmarking IRB

Le benchmarking IRB a pour objectif de révéler une variabilité injustifiée des estimations des paramètres de risque (PD, LGD, CCF) et RWA à travers l’approche IRB.
Il se trouve qu’une partie importante de la variabilité observée est due aux différents niveaux de prudence que les établissements intègrent dans les estimations des paramètres de risque ou le calcul des RWA. Cette prise en compte des marges de prudences dans les modèles est cohérente avec les exigences de la CRR.
En effet, selon la CRR, il est nécessaire d’ajouter aux estimations des banques, une marge de prudence liée à la fourchette attendue d’erreurs d’estimation. Lorsque les méthodes et les données sont jugées moins satisfaisantes, la marge d’erreurs attendue est plus large. Ceci entraine inévitablement une marge de prudence plus grande.
Ce projet d’ITS propose donc de collecter des informations à cet égard.

3.1.2.    Clarification des exigences de reporting sur la MOC

La guideline EBA sur la PD et la LGD a introduit un cadre pour l’estimation de la MoC. Cette dernière s’applique aux portefeuilles HDP IRB à partir du 1er janvier 2022 et aux portefeuilles LDP IRB à partir du 1er janvier 2024. Ainsi, les informations sur la MoC incluses dans les estimations des paramètres de risque des portefeuilles HDP doivent être collectées à partir de l’exercice de benchmarking 2022, sur la base des données au 31 décembre 2021.
La collecte des informations sur la MoC sera volontaire pour les portefeuilles LDP jusqu’au 31décembre 2023.

3.1.3.    Une collecte des données visant à améliorer la justification de la variabilité des RWA entre les banques

La collecte de données permettra de justifier la variabilité observée sur les estimations de risque utilisées pour le calcul des RWA et la variabilité observée sur les paramètres de risque net de marge de conservatisme et net des planchers de conservatisme issus des mesures de supervision ou de la réglementation.
Par ailleurs, il y a une hétérogénéité des pratiques de supervision en matière de conservatisme. En effet, certains superviseurs préfèrent prescrire des marges de conservatisme directement sur les niveaux de fonds propres et non pas sur les estimations des paramètres de risque ou aux RWA. Afin de capter toutes les sources de marges de conservatisme, des informations sur les RWA ou les add-ons de capital potentiellement existants sont également collectées. Il pourrait cependant être envisagé de collecter ces informations uniquement pour des portefeuilles de benchmarking spécifiques pour des raisons de simplicité de mise en œuvre.

3.1.4.    De nouvelles informations demandées dans les templates de l’exercice de Benchmarking

De nouvelles colonnes ont été ajoutées aux templates benchmarking, pour collecter des informations sur les paramètres de risque pris en compte dans le calcul des RWA. Ces derniers dépendent d’un des éléments suivants :

  • Les planchers ou de multiplicateurs de conservatisme imposés par les équipes de supervision prudentielle.
  • La composante MoC incorporée dans les estimations internes propres aux banques.

Étant donné que le CCF n’a pas été au centre de l’exercice benchmarking, les informations sur les MoC relatives au CCF ne sont pas collectées.
Des colonnes supplémentaires ont été également ajoutées aux templates afin de collecter des informations sur les add-ons de capital prescrites par les autorités de supervision suite aux lacunes dans l’approche IRB et qui ne sont pas reflétées dans les estimations des paramètres de risque analysées lors de l’exercice de benchmarking. Ces informations sur les add-ons de capital seront demandées au niveau global en raison des difficultés opérationnelles de repartir ces add-ons par sous-portefeuilles.

3.1.5.    Une collecte d’information sur le conservatisme ciblée au niveau des portefeuilles par souci de pragmatisme

L’avantage de collecter les informations sur le conservatisme au niveau de granularité des portefeuilles de benchmarking repose sur la simplicité de l’analyse associée. Par exemple, l’analyse des écarts avec et sans conservatisme révélera plus facilement, à ce niveau de granularité, des valeurs aberrantes dues à la variabilité du conservatisme.
La principale complexité dans le traitement des informations nouvellement ajoutées réside dans leur nature agrégée, car les établissements devront agréger les paramètres de risque avec et sans prudence et ainsi calculer plusieurs fois les fonds propres réglementaires pour les portefeuilles de benchmarking considérés.

3.2.   Des changements mineurs apportés aux templates IRB

Il est proposé de créer les portefeuilles supplémentaires suivants :

  • 4 portefeuilles pour la classe d’exposition sur les sociétés non financières et sur les autres sociétés financières.
  • 2 portefeuilles pour la classe d’expositions sur les sociétés non financières.
  • 4 portefeuilles pour la classe d’expositions sur les établissements de crédit et sur les souverains.
  • 4 portefeuilles pour la classe d’expositions sur les établissements de crédit et sur les souverains.

Il est à noter une augmentation significative de l’utilisation du principe de substitution des pondérations de risque en raison des garanties publiques dans la crise COVID. Ainsi, les portefeuilles pour lesquels la substitution des pondérations de risque est appliquée de telle sorte que l’exposition à risque après prise en compte des garanties et les RWA soient à zéro ou en blanc doivent être déclarés dans un template dédié.

Ceci facilitera une meilleure transparence sur les taux de défaut qui pourraient être biaisés dans les années à venir en raison des garanties publiques.

4.   Les évolutions prévues dans le cadre des templates IFRS9 pour l’exercice 2022

4.1.   Des templates sur la PD IFRS9 inclus dès 2021 dans l’exercice de Benchmarking

Conformément aux communications de L’EBA relatives au suivi de la mise en œuvre effective d’IFRS 9 dans l’UE, un nouvel ensemble de templates liés aux paramètres risques d’IFRS 9 a été intégrés dans l’exercice de benchmarking 2021.
Sur la base de l’approche échelonnée développée dans la feuille de route IFRS 9, ces templates pour l’exercice 2021 s’étaient concentrés sur la collecte des paramètres PD (y compris les métriques liées à l’augmentation significative du risque de crédit).

4.2.   Un élargissement des templates pour la collecte des ECL IFRS9 pour l’exercice benchmarking 2022

4.2.1.    Objectif des nouveaux templates

Le principal objectif de l’ensemble actuel de templates est de collecter des données quantitatives sur les paramètres ECL d’IFRS 9 et d’autres informations pertinentes susceptibles d’entraîner des incohérences significatives dans les résultats de l’ECL, affectant, de fait, les fonds propres et les ratios réglementaires.
Il s’agira également pour les banques de remplir un questionnaire qualitatif en complément.
Toutes ces informations collectées permettront d’avoir une bonne compréhension des différentes méthodologies, modèles, données d’entrées et scénarios utilisés dans le cadre d’IFRS9.

4.2.2.    Des nouveaux templates afin de mieux challenger la LGD IFRS9 et améliorer la comparabilité entre les banques

Les nouveaux templates sont principalement liés au paramètre de risque LGD.
La collecte de données LGD est étendue de manière à garantir la comparabilité entre les établissements. En effet, si les PD pour les mêmes débiteurs sont directement comparables en ce qui concerne le même risque de défaut, il n’en est pas de même pour la LGD, car les caractéristiques de l’exposition (par exemple l’existence d’un collatéral ou d’une garantie) pourraient conduire à des valeurs différentes pour le même débiteur.
Par conséquent, la collecte de données est basée sur la logique de « LGD hypothétique ». Contrairement aux valeurs de PD qui ne reposent que sur des paramètres effectivement attribués par les établissements (et donc uniquement pour les débiteurs pour lesquels l’établissement a une exposition à leur égard), la LGD hypothétique peut différer des paramètres effectivement utilisés dans le calcul de l’ECL.
En pratique, les valeurs hypothétiques de LGD sont les valeurs de LGD qui seraient appliquées en considérant que l’exposition envers la contrepartie était senior et non garantie et sans clause de nantissement négatif en place. Ce concept est utilisé pour la :

  • LGD IFRS 9 non-garantie à 12mois (hypothétique).
  • LGD IRB Non garantie et sans MoC (hypothétique). Cette dernière est définie sur la base des estimations hypothétiques de la perte en cas de défaut qui seraient appliquées par l’établissement à la contrepartie, sans :
    • Aucune marge du conservatisme (MoC).
    • Aucun plancher réglementaire.
    • Aucun ajustement à la baisse.
    • Aucun add-ons des autorités de supervision.
    • Aucune autre mesure ou ajustement conservateur, à l’exception de ceux qui sont retenus aux fins de l’estimation de la LGD à 12 mois d’IFRS 9.

5.   Références

https://www.eba.europa.eu/sites/default/documents/files/document_library/Publications/Consultations/2020/Consultation%20on%20ITS%20amending%20Commission%20Implementing%20Regulation%20%28EU%29%202016-2070%20with%20regard%20to%20benchmarking%20of%20internal%20models%20/961621/Draft%20CP%20on%20%20ITS%202022.pdf

 

Abbréviations et glossaire

EBA: European Banking Authority

MOC: Margin of Conservatism

LGD: Loss Given Default

PD: Probability of Default

CCF: credit Conversion factor

HDP: High Default Portfolio

LDP: Low Default Portfolio

IRB: Internal Rating Based

IMV: Initial Market Valuation

ASA: Alternative Standard Approach

SBM: Sensitivity Based Method

DRC: default risk charge

RRAO: the residual risk add-on

RM: Risk Measure

FRTB: Fundamental Review of Trading Book

ECL: Expected Credit Loss

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