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Loi Sapin 2 : quels effets sur l’assurance ?

law-419057_640 La loi Sapin 2 vient de nous apporter des renversements importants et totalement imprévus dans le domaine de l’assurance.

En effet par l’Assemblée Nationale.

 

1) En matière d’Assurance Emprunteur (Article 29 bis) : consécration de la déliaison

Pour rappel, les emprunteurs peuvent déjà, depuis la loi Consommation de 2014, changer d’assurance emprunteur durant l’année qui suit le prêt, en prenant une assurance externe (délégation d’assurance) si les garanties sont équivalentes aux garanties du contrat proposées par la Banque (Contrat Groupe).

Les députés viennent donc de voter un article qui autorise le changement d’assurance à tout moment durant la durée du prêt.

L’objectif de cette mesure est de permettre à tout emprunteur de faire jouer la concurrence et d’opter pour l’assurance la moins chère.

Cet empressement des parlementaires est relativement étonnant dans la mesure où cet amendement a été voté alors même que les conclusions des études en cours sous l’égide du Comité Consultatif du secteur financier CCSF sur les effets de la loi Hamon (période de 12 mois) en matière de déliaison sont en cours d’analyse (et donc pas encore connus).

Or, et là est l’essentiel, les conséquences de cet amendement peuvent amener à une démutualisation excessive au détriment des catégories sociales d’accédant à la propriété les plus fragiles sur les plans des revenus, de l’âge ou de la santé ; le dispositif actuel d’assurance emprunteur a l’avantage de permettre la solidarité entre emprunteurs en reposant sur la mutualisation des risques.

Reste à savoir si le stock des contrats en cours est impacté puisque ce stock a été contractualisé dans des conditions qui excluaient toute dénonciation annuelle : l’assureur s’étant engagé sur un tarif fixe sur toute la maturité du prêt.

Cette rupture dans l’équilibre des contrats pourrait faire l’objet d’un recours en inconstitutionnalité.

A suivre donc !

 

 

2) Élargissement des pouvoirs du Haut Conseil de Stabilité Financière au domaine des assurances (art 21 bis)

 L’article 21 bis vise à adapter les pouvoirs dont dispose le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) afin de lui permettre de remplir son mandat de « surveillance du système financier dans son ensemble, dans le but d’en préserver la stabilité et la capacité à assurer une contribution soutenable à la croissance économique ».

L’article permet de prendre différentes mesures conservatoires transversales destinées à prévenir des risques représentant une menace grave pour le bon fonctionnement du marché et la situation financière des organismes d’assurance.

A titre d’exemple, comme nous le verrons plus loin, dans le domaine de l’assurance vie, le HCSF pourra suspendre, retarder ou limiter les rachats.

La mesure, qui n’a évidemment pas vocation à être utilisée de manière courante, doit permettre, dans des situations exceptionnelles de crise grave et avérée, de renforcer la protection des assurés et éviter que les assurés les plus modestes et les moins avertis ne soient pénalisés par rapport à d’autres, qui pourraient réaliser des arbitrages plus rapides.

Il a bien entendu été précisé que le Haut Conseil de Stabilité Financière devra tenir compte des intérêts des assurés, des adhérents et des bénéficiaires des contrats d’assurance dans l’exercice des nouveaux pouvoirs que lui confie la loi.

 

  

3) Possibilité pour les épargnants modestes de débloquer leur PERP

Les députés ont voté l’article 33 bis qui va permettre d’autoriser, selon certaines conditions, le déblocage des PERP peu abondés, ce qui rendra un supplément de pouvoir d’achat aux personnes en difficulté financière souhaitant récupérer les sommes versées sur leur PERP.

Le PERP, dispositif d’assurance épargne retraite de long terme créé en 2003, est un placement de longue durée.

Assorti d’un régime fiscal favorable, il a pour objectif d’assurer à son souscripteur un revenu complémentaire au moment de son départ en retraite, ce qui justifie l’absence de possibilité de sortie anticipée et la faculté de racheter le contrat.

 

Or, de nombreux PERP ont été souscrits par des personnes qui n’auraient pas dû en souscrire, au regard de leur situation personnelle et de la composition de leur patrimoine et de leurs revenus.

Or, dans le nouveau contexte de la loi, si les souscripteurs de PERP répondent aux conditions suivantes :

  • « La valeur de transfert du contrat est inférieure à 2 000 € ;
  • « Pour les contrats ne prévoyant pas de versements réguliers, aucun versement de cotisation n’a été réalisé au cours des quatre années précédant le rachat … » ;

ils pourront demander de racheter leur PERP.

 

4) En matière d’Assurance Vie

Dans ce domaine, l’avenir ne semble guère radieux, notamment pour les fonds en euros : la garantie des fonds en euros est remise en cause dans un contexte de taux bas. En effet, plus les assureurs vie collectent, plus ils doivent investir aux conditions actuelles de marché, ce qui, mécaniquement, dilue le rendement global du fonds en euros et obère les espoirs de performance future. Plusieurs alertes du gouverneur de la Banque de France depuis des mois leur demandait de prendre des mesures drastiques envers leur assurés pour ne pas servir un taux d’intérêt « dur », décorellant ainsi la rentabilité du contexte économique de taux bas.

C’est pourquoi certains assureurs comme Generali et Spirica ont sauté le pas en revoyant leurs conditions générales et en mentionnant que la garantie des versements sur le fonds en euros s’exprimera désormais “brute de frais”.

Le projet de loi dit Sapin 2 prévoit de donner la possibilité au HCSF (Cf plus haut) de demander aux assureurs davantage de modération dans la fixation de leurs taux de rendement du fond euros si nécessaire. Cela ne constitue-t-il pas une atteinte à la liberté de l’assureur de fixer son taux de rendement ?

Une autre menace plane au-dessus de l’assurance vie, en cas de remontée des taux. Les épargnants pourraient délaisser les vieux contrats au rendement affaibli au profit d’autres produits affichant des rémunérations plus séduisantes. La loi Sapin 2 prévoit ce cas de figure en donnant au HCSF la possibilité de limiter ou de bloquer temporairement les retraits sur le fond euro uniquement.

A l’heure actuelle, il est donc souhaitable dediversifier ses avoirs sur des unités de comptes qui, elles, ne seront pas bloquées.

Il est donc urgent de revoir au plus vite l’allocation d’actifs de ses contrats d’assurance vie.

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