1. Le questionnement de l’EBA sur les modalités d’intégration du risque ESG dans le cadre prudentiel de mai 2022
1.1. Contexte
Les risques ESG représentent, tant dans leur dimension physique que dans leur dimension de transition, de nouveaux facteurs de risques aggravants pour les risques existants qu’il convient de prendre en compte dans les exigences de fonds propres.
Il s’agit donc de déterminer quelle est la meilleure approche d’intégration des risques ESG dans le pilier 1 en évitant tout double comptage avec l’existant, et en ayant le degré de prudence suffisant étant donné que les risques ESG entraîneront des pertes plus élevées et potentiellement plus extrêmes que par le passé.
1.2. La démarche de l’EBA
Il s’agit donc d’évaluer :
- Si le cadre prudentiel actuel permet déjà de traiter les facteurs de risque environnementaux de manière satisfaisante.
- S’il y a besoin d’un traitement prudentiel spécifique des expositions sensibles au risque ESG.
- S’il est pertinent d’utiliser des méthodologies prospectives compte tenu de la nature prospective des risques ESG.
- S’il est pertinent d’introduire des facteurs de soutien « verts » et les facteurs de pénalisation « bruns » dans la méthodologie de calcul des RWAs.
- S’il est pertinent d’exiger une augmentation générale du niveau minimum de fonds propres étant donné le caractère aggravant du risque ESG dans les prochaines années.
- S’il est pertinent de considérer que les risques ESG entrainant une dégradation du profil de risque du portefeuille (rating…) entraineront naturellement, sans que le niveau minimum réglementaire des fonds propres ne soit modifié :
- Soit une augmentation des montants de fonds propres des banques ayant ces actifs bruns dans le portefeuille.
- Soit une réallocation interne de capitaux vers les secteurs les plus verts au sein de chaque institution pour maintenir le niveau de fonds propres internes stable.
1.3. Le traitement des risques sociaux différé dans un second temps du fait de sa complexité et sa corrélation aux environnementaux
Cette analyse de l’EBA est axée sur les impacts environnementaux. Celle liée aux impacts sociaux sera prise en compte dans les prochaines étapes. Ceci s’explique entre autres parce que les impacts sociaux sont liés aux risques environnementaux. D’où la pertinence de commencer par les risques environnementaux.
- La détérioration continue des conditions environnementales implique des risques sociaux accrus, lorsque des événements physiques affectent les populations, exacerbent les migrations et les troubles sociaux et politiques, ou lorsque les changements technologiques ou réglementaires traitant des risques environnementaux ont un impact sur les marchés du travail dans les industries (non vertes).
- Les risques sociaux peuvent également être entraînés par des changements dans les politiques et le sentiment du marché liés à la transformation sociale vers une société plus équitable, en ce qui concerne les droits du travail ou les droits de l’homme plus largement. Ces risques sociaux peuvent avoir une incidence sur les contreparties des établissements et entraîner des risques financiers associés.
2. Le cadre DE l’analyse de l’EBA
2.1. Une analyse de l’EBA fondée sur les risques
L’analyse adopte une approche fondée sur les risques pour s’assurer que les exigences prudentielles reflètent les risques sous-jacents et soutiennent la résilience des établissements face à ces risques.
- Les exigences prudentielles devraient refléter les profils de risque des expositions et ne devraient pas être utilisées à d’autres fins stratégiques.
- D’autres instruments politiques en dehors du cadre prudentiel ont un rôle plus important à jouer dans la transition vers une économie durable et auront une incidence sur les risques dans le secteur financier.
2.2. Les risques couverts
Les risques couverts par l’analyse de l’EBA sont :
- Risque de crédit.
- Risque de marché.
- Risque opérationnel.
- Risque de concentration.
Ces risques couvrent différents éléments du cadre prudentiel et la manière dont ils interagissent avec les risques environnementaux.
La proposition de l’EBA détaille les ajustements qui pourraient être faits pour prendre en compte le risque ESG
3. Les conclusions de l’analyse de l’EBA
Bien qu’il contienne certains messages clés, cette proposition de l’EBA est de nature exploratoire et ne tire aucune conclusion définitive.
3.1. Des modifications ciblées et spécifiques de la méthodologie de calcul de RWAs a la place d’une introduction de facteurs de soutien « vert » ou de pénalisation « BRUN »
L’analyse de l’EBA démontre que le cadre du pilier 1 comprend déjà des mécanismes qui permettent d’inclure de nouveaux types de facteurs de risque tels que ceux liés aux risques environnementaux.
- Il s’agit notamment des modèles internes, des notations de crédit externes et des évaluations des garanties et des instruments financiers.
- Des améliorations ou des clarifications ciblées du cadre prudentiel sont explorées pour aborder explicitement les risques environnementaux.
L’analyse initiale indique que des modifications ciblées des exigences prudentielles existantes permettront de traiter les risques ESG avec plus de précision que des facteurs du soutien « vert » ou de pénalisation « brun » des RWAs, compte tenu des divers défis associés à leur conception et à leur mise en œuvre.
3.2. Une prise en compte en parallèle du risque ESG dans le pilier 2 pour les risques non couverts par le pilier 1
Dans le cadre du pilier 2, les autorités compétentes évaluent déjà des risques supplémentaires, tels que le risque stratégique, le risque de réputation ou le risque de concentration, qui peuvent être affectés par des facteurs de risque environnementaux. Ainsi, les autorités de supervision intègreront les risques ESG comme des axes prioritaires de surveillance en 2022 et dans les prochaines années.
3.3. Une nécessaire collecte importante des données ESG afin de préparer les évaluations rétrospectives ET PROSPECTIVES des risques ESG
Le cadre prudentiel a toujours été fondé sur des évaluations rétrospectives des risques. Cela ne correspond pas à la nature prospective des risques environnementaux. Les banques devront donc mettre l’accent sur la collecte de données relatives aux risques environnementaux et veiller à ce que les outils et les pratiques de gestion des risques tiennent explicitement compte des risques environnementaux. Ceci permettra de préparer les analyses prospectives en surmontant les défis liés à la disponibilité des données qui rend difficile l’évaluation robuste des risques ESG. Cette évolution de la méthodologie d’évaluation pourra s’inscrire dans la nature adaptative du cadre prudentiel actuel.