1. introduction
L’intégration des risques ESG dans le Pilier 1 des banques européennes est désormais une priorité politique. Mais l’EBA, mandatée par la CRR3, constate que la route est encore longue. Les établissements progressent, surtout sur le climat et la biodiversité, mais les données restent fragiles et les méthodologies très hétérogènes. Peut-on bâtir des exigences de fonds propres solides sur une base aussi inégale ?
2. Un mandat ambitieux mais complexe
- La mission donnée à l’EBA
- La CRR3 charge l’EBA d’évaluer si les risques ESG doivent être intégrés dans le calcul prudentiel, et comment. L’objectif est double : encourager le financement durable et protéger la stabilité du système bancaire.
- Trois garde-fous nécessaires
L’exercice doit :
-
- rester techniquement faisable,
- être aligné avec les objectifs climatiques,
- éviter les effets pervers comme le double comptage ou le greenwashing réglementaire.
3. Des pratiques bancaires inégales
- Une enquête large mais contrastée :
- L’EBA a interrogé 36 banques couvrant 27 % des expositions européennes pour évaluer leurs pratiques d’intégration de l’ESG dans les modèles IRB. Il présente ses résultats dans son dernier rapport sur l’intégration de l’ESG dans le pilier 1 (EBA/REP/2025/06).
- Résultat : des approches très diverses, selon les portefeuilles et la disponibilité des données (1).
- Les avancées les plus visibles
- Les grandes entreprises bénéficient de scores internes et de stress tests climatiques.
- Les crédits hypothécaires commencent à intégrer performance énergétique et risques physiques.
- Les angles morts persistants
- Les PME restent largement hors radar faute de données, tandis que les risques sociaux et de gouvernance ne sont encore que qualitativement décrits.
4. Les obstacles structurels
- La faiblesse des données : les proxys, très utilisés, affaiblissent la robustesse des évaluations.
- Une dépendance aux fournisseurs externes : les méthodologies hétérogènes des prestataires créent des écarts significatifs entre institutions.
- Une couverture encore partielle : les ménages, les PME et les chaînes de valeur échappent pour l’instant largement à l’analyse.
5. Des recommandations progressives
- Concentrer l’effort sur les grandes entreprises : plus exposées et mieux documentées, elles constituent un terrain d’expérimentation crédible.
- Améliorer la collecte immobilière : l’intégration des critères énergétiques et géographiques est un levier concret pour les crédits hypothécaires.
- Définir des principes directeurs communs : des lignes de haut niveau, plutôt qu’un cadre unique, favoriseraient une convergence progressive.
6. Les questions QUI RESTENT ouvertes
- Les limites des modèles actuels : peuvent-ils refléter la complexité des risques climatiques et sociaux, alors qu’ils reposent sur des données historiques ?
- Le débat sur la calibration : faut-il un Green Supporting Factor (allègement de capital) ou un Brown Penalizing Factor (pénalisation des expositions brunes) ?
- La dépendance critique à la qualité des données : sans données fiables, difficile de justifier une exigence en fonds propres crédible et équitable.
7. Conclusion
L’intégration des risques ESG dans le Pilier 1 n’est plus optionnelle mais elle ne peut pas être immédiate. Le rapport de l’EBA montre à la fois des progrès réels et des fragilités profondes. La clé réside dans l’amélioration de la qualité des données et dans la définition de principes communs, sans brûler les étapes. L’Europe joue ici un équilibre délicat : inciter les banques à financer la transition tout en maintenant la rigueur prudentielle.
Pour en savoir plus, l’AFGES vous propose des formations adaptées à la compréhension et à la maîtrise de ces enjeux ainsi qu’un certificat dédié au risque ESG.
- Bâle III (CRR, CRR 2, CRD 4, CRD V, CRR3) : fondamentaux du risque de crédit
- Collecte et traitement des données ESG
- Intégration du risque ESG dans les exigences de fonds propre Pilier 1
- Canaux de transmission des risques ESG sur les risques traditionnels bancaires, analyse de materialite, stress tests, ICAAP, ILAAP
- Certificat Risque ESG